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Performance du système de santé
Le système de santé luxembourgeois montre une bonne performance en termes de résultats de santé et d'accessibilité, mais des défis subsistent en matière d'équité, d'information et d'efficacité.
Suivi de la performance du système de santé et systèmes d'information
La capacité à prendre des décisions sur la base de données probantes se développe. La création de l'Observatoire national de la santé en 2022 vise à améliorer l’appréciation objective de la performance du système de santé, en donnant aux responsables politiques la possibilité de repérer les problèmes et d'évaluer l'impact de leurs actions. En juin 2024, le Luxembourg a également entrepris l'élaboration d'un cadre de référence pour l'évaluation de la performance du système de santé, dans le but de renforcer la planification stratégique, l'élaboration de politiques et le suivi du système de santé, de même que les réformes actuelles et à venir. Néanmoins, la capacité à évaluer les politiques de santé au Luxembourg demeure difficile, en l’absence de suivi systématique de leur implémentation et d’évaluation de leur impact, et de système d'information national de santé adapté à la collecte systématique, à l'analyse et à l'utilisation de données de santé de la population.
Accessibilité et protection financière
La disponibilité des services et soins de santé est globalement élevée au Luxembourg, et le niveau de satisfaction des résidents du pays à cet égard se classait au troisième rang des pays de l'OCDE en 2022 (OECD, 2023b). La couverture en matière de soins de santé est élevée, et la population assurée bénéficie d'un accès universel et d'un vaste panier de soins et de prestations. Les dépenses de santé catastrophiques sont relativement faibles : 2,3 % de la population avaient déclaré de telles dépenses en 2019 (WHO Regional Office for Europe, 2023). Bien que les délais d'attente demeurent un défi, les besoins non satisfaits en traitements médicaux et dentaires figurent parmi les plus bas d'Europe.
En 2023, seul 0,8 % de la population a déclaré avoir des besoins de soins médicaux non satisfaits en raison du coût, de la distance ou du délai d'attente, ce qui était significativement inférieur à la moyenne de l'UE (2,4 %, cf. Figure 8) ; et 1,2 % de la population indiquait des besoins non satisfaits en matière de soins dentaires, soit près de trois fois moins que la moyenne de l'UE (3,4 %) (Eurostat, 2024). Des disparités persistent malgré tout : le quintile le plus pauvre de la population déclare avoir des besoins de soins médicaux et dentaires non satisfaits qui sont plus élevés que ceux du quintile le plus riche, de 1,1 % et 2,5 % points de pourcentage, respectivement.
Qualité des soins de santé
Le Luxembourg n'a pas de programme national d'assurance qualité des soins de santé ; la responsabilité du suivi et de la garantie de la qualité des soins incombe aux prestataires. Les données documentant la qualité des soins dans le pays restent insuffisantes. Selon les indicateurs utilisés au niveau international pour évaluer la qualité des soins primaires, les résultats du Luxembourg ne sont pas très satisfaisants. Les taux d'hospitalisation évitables standardisés par âge, pour des pathologies qui pourraient être traitées efficacement en soins primaires – telles que l'asthme et la bronchopneumopathie chronique obstructive, l'insuffisance cardiaque congestive, le diabète et l'hypertension – s'établissait pour toutes ces pathologies combinées à 554,5 pour 100 000 habitants en 2021, ce qui plaçait le Luxembourg dans le groupe intermédiaire des pays européens pour lesquels des données ont été rapportées (cf. Figure 9). Des efforts pour collecter et analyser des données relatives à la mesure de l'expérience et des résultats déclarés par les patients sont en cours (cf. Encadré 6).
Encadré 6 Que pensent les patients des soins qu'ils ont reçus ?
L'Enquête européenne par interview sur la santé conduite au Luxembourg fournit des informations sur la satisfaction des patients et leur perception du système de santé. En 2019, les résidents étaient globalement satisfaits : plus de 90 % des patients déclaraient que leur médecin avait passé suffisamment de temps avec eux lors de leur dernière consultation, qu'il avait fourni assez d'informations et/ou leur avait donné la possibilité de poser des questions ou d'exprimer leurs préoccupations. Environ 85 % des répondants se sentaient également impliqués dans la prise de décision partagée.
Dans les hôpitaux aigus, des mesures sur l'expérience vécue par le patient sont réalisées sur base individuelle. Il est cependant ardu d'évaluer ces mesures en raison de l’absence de méthodes standardisées entre les hôpitaux et de données publiques comparables insuffisantes. Des efforts sont en cours pour développer des mesures de l'expérience et des résultats déclarés par les patients mais, à ce jour, elles ne sont pas déployées à large échelle.
Résultats du système de santé
Dans l'ensemble, le Luxembourg obtient de bons résultats en termes de santé de sa population. En 2022, l'espérance de vie à la naissance au Luxembourg atteignait 83,0 ans, légèrement au-dessus du niveau précédant la pandémie de COVID-19 (82,7 ans). Il s'agit de l'un des niveaux les plus élevés des pays de l'UE, situé 2,4 ans au-dessus de la moyenne de l'UE, qui était de 80,6 ans (Eurostat, 2024). Ces dix dernières années, la mortalité évitable par prévention et par traitement a diminué au Luxembourg. En 2020, le Luxembourg a enregistré le second taux de mortalité évitable par traitement le plus bas de l’UE (soit 60,3 décès pour 100 000 habitants, taux standardisé par âge) ; de façon similaire, le pays a enregistré l'un des taux de mortalité évitable par prévention (standardisé par âge) les plus faibles : 133,7 décès pour 100 000 habitants (cf. Figure 10). Il n'en reste pas moins que les facteurs de risque comportementaux continuent de contribuer fortement à la mortalité au Luxembourg, qui sont responsables d'environ un décès sur trois selon les estimations officielles (OECD/ European Observatory on Health Systems and Policies, 2023). En 2021, le nombre d'années de vie en bonne santé à la naissance, pour les femmes et les hommes (61,6 ans et 62,3 ans respectivement), était inférieur à la moyenne de l'UE (64,2 ans et 63,1 ans respectivement) (Eurostat, 2024). C'est pourquoi l'accent devrait être davantage placé sur la mise en oeuvre d'interventions de santé publique efficaces, comme le montre l'exemple des politiques de lutte contre le tabagisme (cf. Encadré 7).
Encadré 7 Les interventions de santé publique font-elles la différence ? L'exemple du tabagisme
Bien que le tabagisme chez les jeunes ait montré une tendance à la baisse ces dernières années, une légère hausse a été observée en 2021.Le déclin initial peut être attribué à diverses initiatives de lutte contre le tabagisme, notamment l'interdiction de fumer dans les lieux publics instaurée en 2006, suivie d'autres lois en 2013 et 2017. Ces mesures imposaient une restriction de certaines substances, et interdisaient la publicité et le parrainage des produits du tabac (sauf dans les points de vente), y compris sur le nom et la marque du produit (introduction de l'emballage neutre). La loi oblige également à faire figurer des avertissements de santé sur les produits du tabac, ainsi que des images graphiques sur les paquets de cigarettes et de tabac à rouler. Outre ces initiatives gouvernementales, un programme de sevrage tabagique offre des consultations gratuites dans les cabinets médicaux pour aider les personnes à arrêter de fumer.
En 2023, la Fondation Cancer a lancé la campagne Génération Sans Tabac, qui vise à créer la première génération adulte sans tabac d'ici 2040.Mais le Luxembourg est moins proactif que d'autres pays européens dans l'utilisation de mesures de dissuasion financière contre le tabagisme : les prix des cigarettes y sont les plus bas d'Europe coûtant environ 5 à 8 euros pour un paquet de 20 cigarettes, contre environ 12 euros en France. En juillet 2023, le prix a augmenté de 0,20 euro par paquet (Le Gouvernement luxembourgeois, 2023).
Une baisse plus prononcée du tabagisme pourrait être obtenue par des stratégies additionnelles de mise en œuvre et d'évaluation de mesures de lutte contre le tabagisme et de renforcement des mesures de dissuasion financière.
Efficience du système de santé
Les indicateurs relatifs à l'efficience du système de santé montrent qu'il existe une marge d’amélioration pour le système de soins au Luxembourg. La performance du système de santé en termes de coûts des intrants et des résultats peut être sommairement illustrée par un graphique comparant les dépenses de santé courantes et le taux de mortalité évitable par traitement (cf. Figure 11). Sur cette base, on constate que le Luxembourg a l'un des taux de mortalité évitable par traitement les plus faibles, mais aussi les dépenses de santé par habitant figurant parmi les plus élevées des pays dont les résultats de santé sont semblables.
En outre, le Luxembourg ne dispose toujours pas d’un mécanisme de priorisation pour l'allocation budgétaire, et cela, malgré diverses réformes visant à améliorer la viabilité financière et à endiguer les coûts. Le modèle de financement actuel offre peu d’incitations à améliorer l'efficience, et la prévention demeure une priorité de niveau faible dans le domaine des soins de santé.
D’autres facteurs influencent l'efficience du système de santé, comme les obstacles au partage des tâches entre les différents groupes de professionnels de la santé, et le manque d'interopérabilité entre les systèmes d'information. En raison de ce manque d'interopérabilité, l'enregistrement des données n'est pas standardisé, et les informations de santé ne sont donc pas facilement accessibles à tous les prestataires de soins.